L’ensemble de la communauté du Lycée Français Alexandre Dumas en Haïti rend hommage au professeur Samuel Paty et à la liberté d'expression.
C’est toute l'humanité et la communauté éducative, à travers les valeurs dont elle est porteuse, qui se voient touchées par ce drame et par sa portée symbolique.
- Professeur d’histoire-géographie à Conflans Ste Honorine, Samuel Paty a été assassiné, le 16 octobre 2020 - accusé de transmettre à ses élèves la liberté de penser par eux-même - un virus contagieux jugé trop dangereux pour ceux qui, sous de faux prétextes (foi aveugle, intolérance, xénophobie…), défendent leurs privilèges en étendant leur pouvoir sur la liberté d'autrui.
En regard à cet événement foncièrement tragique,
En premier lieu par ses conséquences injustifiables et incommensurables au regard de la cause prétextée:
- L’assassinat puis la décapitation d’un enseignant par un fanatique religieux pour avoir donné le choix à ses élèves de regarder ou non un dessin (une caricature) sur le thème de la liberté d’expression. Des caricatures qui avaient déjà causé la mort d’une grande partie de l’équipe du journal satirique Charlie Hebdo, en janvier 2015 lors d’un attentat commis au nom d'Allah, par de jeunes désiquilibrés.
Mais aussi par son déroulement :
- A l’image du grand écart actuel de nos sociétés florissantes - entre une course aux progrès technologiques irrépressible et une majorité de laissés pour compte - des individus qui n’ont la possibilité d'exister qu'en se raccrochant à ce qu'ils peuvent : aux racines et aux valeurs qui les lient, lorsqu'ils en ont ou bien à celles qu'on leur propose. La société ne leur offrant pas grand chose, des vautours sont là pour faire le reste.
- A travers des dénonciations mensongères (manipulations frauduleuses, fausses rumeurs et incitations à la haine, amplifiées par les nombreux partages sur les réseaux sociaux), effectuées ici au nom d'une morale religieuse par un parent d’élève dont le travail consistait par ailleurs à obtenir des dons pour des organismes "charitables"; un spécialiste de la déontologie !
- Et sous une sidérante indifférence, voir une défiance semi-générale, laissant l’enseignant, sans autre forme de procès, de reconnaissance, ni d'étayage, s’enfoncer inexorablement…
... c'est tout le corps « en saignant » manifeste qui nous est urgemment aujourd’hui demandé de réévaluer et de reconnaître à sa juste valeur.
Pour que les Droits Universels mis en pratique et transmis dans les établissements scolaires laïques en France ou à l’étranger - comme la liberté de penser ou de s’exprimer - soient reconnus, respectés et utilisés dans le monde, il est primordial de reconnaître à sa juste valeur le travail de chacun des enseignants en leur offrant une formation adaptée, du temps et les moyens nécessaires pour le faire.
Il est plus que temps de reconnaître à l’échelle mondiale, pour la santé et l’économie de la vie, la complexité et la valeur intrinsèque du travail des enseignants pour le monde qui nous entoure, nos enfants et les générations futures.
L’éducation - par son ouverture à la richesse et à la diversité des cultures - est pourtant un de nos principaux bastions pour faire barrage à son ombre, la bêtise ou cette prétendue barbarie*, et à son innommable ennemie: la toute puissance, productrice de consommateurs, de bêtise et de peur.
*"Le barbare, c'est d'abord l'homme qui croit à la barbarie", (Claude Lévi-Strauss).
« Madame Anastasie »
Dessin d’André Gill (1840 - 1885), « Madame Anastasie », paru dans L’Eclipse du 19/7/1874. En plus des ciseaux, Gill caractérise l’obscurantisme de la censure par la présence de la chouette, animal lié à l’obscurité). |
Discours à l’Assemblée nationale de Victor Hugo, séance du 11 novembre 1848, par lequel il explique pourquoi les réductions proposées sur le budget spécial des sciences, des lettres et des arts sont mauvaises doublement : elles son insignifiantes au point de vue financier, et nuisibles à tous les autres points de vue. |
Quelques exemples des hommages rendus à S. Paty et à la liberté d'expression par les enseignants et les élèves du LAD :
- Travail réalisé avec les classes de 1B, 2A et 2B ?
- Padlet : Hommage à Samuel Paty par les élèves du Lycée Français Alexandre Dumas de Port au Prince
Professeur de Lettres et Référent Culture, Mme Raffin
Professeur des Ecoles, Mme Fabre
Après des échanges autour de l'école, de la laïcité, et de la liberté d'expression avec leur professeur principal M. GAUTIER, les élèves de 1A ont rédigé une lettre hommage à un professeur qui les a particulièrement touchés, marqués, durant leur scolarité. L'occasion de réfléchir à l'importance d'un professeur, d'un point de vue professionnel mais aussi humain.
Un petit tour en Primaire où les consignes de sécurité et la liberté d'expression se donnent parfois la main... Chut ! (en cachette).
La caricature :
La caricature (du latin carricare : charger, lester un char de poids), par extension « en rajouter », remonte à l'Antiquité, On en a trouvé peintes sur des vases grecs et dans les ruines et sur les papyrus de l'ancienne Égypte.
On donne beaucoup d'extension au sens du terme « caricature », qu'on applique à tous les arts. « Dès le moment où un personnage typique est violemment chargé (L'Avare, Le Bourgeois gentilhomme, le Père Ubu, etc.), on peut dire que c'est là une caricature. Toutefois, dans l'usage le plus courant, on réserve surtout le mot de caricature pour désigner une charge muant en grotesque non pas un type mais un individu personnellement désigné3 ».
Généralement engagés, les caricaturistes de presse ont quelquefois défendu un socle de convictions comme :
- l'attachement à la liberté d'expression, régulièrement mise à mal par la censure ;
- l'attachement à la paix et aux valeurs d'un système politique ;
- la défense des droits civiques et l'appel à la vigilance citoyenne ;
- la défense de minorités silencieuses ou opprimées.
Cependant, « le rire est toujours le rire d'un groupe » (Bergson 1900, p. 5). La caricature s'appuie sur les jugements de valeur de son public, c'est dire sur les préjugés du plus grand nombre. Quand elle abandonne la satire, c'est-à-dire la critique de soi-même, elle se prête à la promotion de l'intolérance en visant des groupes humains de toute nature. Exagération par nature, elle exclut de la communauté les sujets qu'elle lui montre. Faisant d'une particularité physique un stigmate, elle accentue l'étrangeté de ceux qu'elle présente et les figure en ennemis15. Les propagandistes antisémites des années 1880-1905 et de la période 1930-1944 ont largement exploité ces effets, installant par la caricature la fiction du « Juif prédateur »16.
Pourquoi l’art de la caricature est-il sacré pour les Français ?
Historienne, CY Cergy Paris Université)
Droit
En France, le droit à la satire est reconnu comme un élément de liberté d'expression. L’article L 122-5 du Code de la propriété intellectuelle aménage certaines exceptions au droit d'auteur : il en est ainsi notamment de la parodie, du pastiche et de la caricature, compte tenu des lois du genre51. Le droit de caricaturer est soumis, comme les autres éléments du droit de la presse, à l'appréciation des tribunaux. Une personne qui mène une vie tranquille et retirée peut légitimement s'opposer à la publication d'une caricature ; tandis que celle qui s'expose volontairement à la publicité ne peut le faire qu'en invoquant des délits comme la provocation à la haine.
Guillaume Doizy, "La censure du dessin de presse : de la répression aux multiples pressions":
Le Lycée Français Alexandre Dumas de Port-au Prince partage l'hommage national rendu à Samuel Paty: